PAIRE DE GRANDES CORBEILLES À ANSES SERPENT EN PORCELAINE DE SÈVRES DU SERVICE PARTICULIER DE L’EMPEREUR

1809, MARQUE IMPÉRIALE DE 1809 IMPRIMÉE EN ROUGE

Details

Chacune de forme circulaire ajourée reposant sur quatre paires de pieds griffes, munie de deux anses en paire de serpents entrelacés avec dorure mate, l'extérieur doré orné d'une bordure en forme d'anthemion.
H. 23,3 cm. (9 1/8 in.) ; L. 50.5 cm. (19 7/8 in.)
Provenance

Collection de Napoléon Ier, acquise auprès de la manufacture en mars 1810.
FURTHER DETAILS

A PAIR OF SEVRES PORCELAIN CENTREPIECE BASKETS (GRANDES CORBEILLES A ANSES SERPENT) FROM THE SERVICE PARTICULIER DE L'EMPEREUR NAPOLEON, 1809


Lot Essay

Cette superbe paire de corbeilles à anses serpents est la seule paire réalisée pour le service de Sèvres commandée par l'empereur Napoléon Ier en octobre 1807, connu sous le nom de Service particulier de l'Empereur1. Elle a été livrée au palais des Tuileries le 27 mars 1810, juste à temps pour la cérémonie et le banquet de mariage de l'empereur et de l'archiduchesse Marie-Louise d'Autriche, qui ont eu lieu six jours plus tard, le 2 avril, et au cours desquels le service a été utilisé. Sa livraison au palais est consignée dans les archives de la manufacture de Sèvres2, où il est décrit comme le "Service particulier de sa Majesté".
Napoléon envisageait depuis longtemps un second mariage pour accéder au pouvoir politique et avait entamé une procédure de divorce avec sa première épouse, Joséphine, en 1809. Son premier choix s'était porté sur Anna Pavlovna, la plus jeune sœur du tsar Alexandre Ier de Russie. Mais les négociations durent plus longtemps que prévu et l'Autriche, soucieuse d'affirmer sa place entre la Russie et la France, deux superpuissances alliées, souhaite proposer Marie-Louise, fille de l'empereur François II d'Autriche. Le couple est marié par procuration à Vienne le 11 mars et par l'État français le 1er avril. La cérémonie religieuse du mariage a lieu le lendemain, le 2 avril, dans le Salon Carré du Louvre, temporairement transformé en chapelle. Napoléon et Marie-Louise se rendent ensuite aux Tuileries en passant par la Grande Galerie, où a lieu un banquet officiel, du grand couvert.
Les artistes de Sèvres ont commencé à travailler sur le service en janvier 1808 et il a été achevé un peu plus de deux ans plus tard. Il se compose de quatre parties principales : un service (comprenant vingt-quatre assiettes creuses, huit beurriers, dix-huit pots-à-jus et quatre saladiers), un service à dessert (avec vingt-quatre assiettes à monter, douze compotiers, deux vases à glace, quatre sucriers, soixante-douze assiettes et dix corbeilles), un cabaret (avec vingt-quatre tasses et soucoupes, trois sucriers, un pot à crème et un pot à lait), et un service de table en biscuit de porcelaine, soixante-douze assiettes et dix corbeilles), un cabaret (avec vingt-quatre tasses et soucoupes, trois sucriers, un pot à crème et un pot à lait), et un surtout de table en biscuit de porcelaine, composé de vingt-cinq pièces dont seize figures modelées à l'antique. Le coût de l'ensemble s'élève à la somme considérable de 69 549 francs3.
Sur les dix corbeilles fabriquées pour le service à dessert, quatre étaient des "corbeilles forme jatte", quatre étaient des "corbeilles anses panier", et seulement deux, la paire du présent lot, étaient de très grande taille avec des anses serpent, enregistrées comme "grandes corbeilles à anses serpent" au prix de 650 francs chacune4. La décoration du service est décrite dans les registres de la manufacture comme "fond vert de chrome, frise militaire ombrée en brun". Les dix paniers sont entrés sur le marché le 31 mars 1810, notre paire étant simplement décrite comme "richement dorée"5. Seules deux paires de paniers de cette forme ont été enregistrées en 1809, notre paire et la paire offerte par Napoléon au roi de Wurtemberg le 29 décembre 1809, lorsque le roi visita Paris après la campagne d'Autriche. Les archives de la manufacture les décrivent comme des "marly d'or bruni à plat laurier gris têtes camées "6, ce qui les distingue des exemples actuels par leur riche dorure. Le dessin complexe de ces paniers, dont le modèle en plâtre subsiste à Sèvres, a été exécuté en 1804 et est illustré ci-dessous.
Soixante-douze planches étaient incluses dans le service et Napoléon lui-même a fourni des instructions détaillées pour vingt-huit des scènes. Il est extraordinaire pour sa représentation d'exemples spécifiques de la vie politique et culturelle de l'Empire, y compris des scènes topographiques et des événements liés à l'expansion impériale française, en particulier les campagnes de Napoléon en Italie, en Autriche, en Prusse, en Pologne et en Égypte à la fin du XVIIIe siècle et au début du XIXe siècle. S'y ajoutent des vues de Paris, des résidences impériales et des grandes institutions de l'Empire français. La production du service a été supervisée par le directeur de la manufacture Alexandre Brongniart, assisté de Dominique Vivant Denon. Les artistes responsables des scènes peintes comptent parmi les plus accomplis de la manufacture et incluent Jacques-François Swebach, Nicolas-Antoine Le Bel, Jean-François Robert, Christophe-Ferdinand Caron, Jean-Claude Rumeau, Jean-Louis Demarne et François Gonord. Les bordures à fond vert sont décorées en dorure d'une frise de poignards à l'antique entrelacés d'une guirlande de feuillages à la française, dessinée en avril 1807 par le père du directeur de la manufacture, l'architecte Alexandre-Théodore Brongniart. Le décor doré est confié à François-Antoine Boullemier, à son frère Antoine-Gabriel et à Pierre-Jean-Baptiste Vandé.
Les "grandes corbeilles à anses serpent", qui se distinguent par leur grande taille, leurs quatre paires de pieds à griffes en vermeil bruni et leurs anses serpent en vermeil mat, n'apparaissent pas dans le célèbre tableau du banquet de mariage d'Alexandre Benoit Jean Dufay, dit Casanova (1770-1844), où il apparaît que la majeure partie de la table est occupée par le service Grand Vermeil de l'orfèvre Henry Auguste et des éléments du surtout de table en porcelaine biscuitée. Cependant, il est probable que les paniers aient été utilisés lors du festin, si ce n'est pas dans l'ensemble principal, mais dans le cadre de l'élément de porcelaine de service qui constituait le Service particulier de l'Empereur.
Les pièces du service sont aujourd'hui largement diffusées et des exemples sont conservés au musée Napoléon du château de Fontainebleau, au musée de la Malmaison, au musée royal de l'Armée à Bruxelles et au musée de la Cité de la céramique à Sèvres. Une assiette se trouve au Louvre (inv. no. OA10354), une autre au Musée Napoléonien du Palais Princier de Monaco et un petit nombre d'assiettes se trouvent dans des collections privées. Une assiette de ce service, peinte d'une scène représentant la fête au mont Saint-Bernard à l'occasion des funérailles du général Desaix, a été vendue le 9 novembre 2021 chez Osenat, à Fontainebleau (pour 350 000 euros). Une autre, peinte avec Frédéric le Grand et ses lévriers dans les jardins du palais de Sans-Souci à Potsdam, a été vendue dans les mêmes salles le 5 mai 2021, lot 220 (pour 243 750 euros). Une autre peinte avec la frégate " La Muiron " débarquant à Ajaccio avec le général Bonaparte en octobre 1799 a été vendue dans les mêmes salles le 2 juillet 2017, lot 210 (pour 306 250 euros). Une autre, peinte avec le camp de l'Empereur sur l'île de Lobau en 1809, a été vendue dans les mêmes salles le 16 novembre 2014, lot 129, (pour 410 000 euros). Une assiette à décor doré au centre a été vendue par Metayer Mermoz, Antibes, le 4 février 2021 pour 61 750 euros. Une assiette supplémentaire a été vendue par l'Etude Thierry de Maigret, Paris le 8 avril 2016, lot 183 et une autre chez Osenat le 19 novembre 2017, lot 184. Une paire de bougeoirs en biscuit réalisés d'après les modèles du surtout a été vendue chez Sotheby's, Londres, le 4 juillet 2012 (pour 133 000 livres sterling).
Le 15 octobre 1815, Napoléon débarque à Sainte-Hélène avec les fidèles qui l'accompagnent volontairement en exil, dont le général Henri-Gratien Bertrand, grand maréchal du palais, et son épouse, ainsi que le comte Charles de Montholon, aide de camp, et son épouse. Parmi les biens que Napoléon emporte dans sa résidence sur l'île, Longwood House, figurent soixante assiettes du service particulier et du service de cabaret7.
Le Service particulier de l'Empereur, dont cette paire de corbeilles constituait un élément important, était sans aucun doute très prisé par Napoléon, qui donna des instructions précises pour sa décoration, l'utilisa pour le grand événement de son mariage avec Marie-Louise, l'emporta avec lui en exil et spécifia qu'il devait être légué à son fils, Napoléon II, après sa mort. Les pièces du service ne sont pratiquement jamais mises en vente et, parmi les assiettes énumérées dans le service original, seul un petit nombre d'entre elles n'a pas été retrouvé dans les musées ou les collections privées. Il s'agit d'une occasion particulièrement rare d'acquérir une partie intégrante de ce service impérial.
1. Aussi connu comme ‘Service des Quartiers Généraux’.
2. Sèvres, Cité de la Céramique archive, Vy19, f.17-8.
3. Pour plus de références sur le service dans les archives de Sèvres voir C. Leprince, Napoléon 1er & La Manufacture de Sèvres, L'Art de la Porcelaine au service de L'Empire, Paris, 2016, p. 282.
4. Sèvres, Cité de la Céramique archive, (Vu1, f.91).
5. Sèvres, Cité de la Céramique archive, (Vu1, f.91-2).
6. Sèvres, Cité de la Céramique archive, (Vy18, f.98).
7. Nos corbeilles ne font pas partie de ce groupe.

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