GEORGES MATHIEU (1921-2012)
Ornithogale
1978

signé et daté 78 ; titré au revers
huile sur toile

signed and dated 78 ; titled on the reverse
oil on canvas

97 x 195 cm.
38 3/16 x 76 3/4 in.
Footnotes:
Cette œuvre est accompagnée d'un certificat d'authenticité du Comité Georges Mathieu. (https://georges-mathieu.fr/)

Provenance
Collection de l'artiste, France
Acquis auprès de celle-ci par le propriétaire actuel

Exposition
Avignon, Palais des Papes, Mathieu, 1985, p. 20, n° 61


En 1985 au Palais des Papes à Avignon se tient une importante exposition après la rétrospective en 1978 à Paris au Grand-Palais. Elle réunit cent peintures de très grands formats, représentatives du parcours de Mathieu depuis 1944. Elles affirment le triomphe de celui qui donna ses lettres de noblesse à l'abstraction lyrique dont le nom lui est redevable. De la révolte à la renaissance, jusqu'à l'abstraction prophétique, le langage de Mathieu s'est érigé en un style qui vaut comme signature. Depuis la publication de son texte Esquisse pour une Embryologie des Signes en 1951, Mathieu a érigé le signe en un acte fondateur de l'inversion sémantique, faisant table rase de tout le système de pensée depuis Platon jusqu'à Heidegger. En créant une nouvelle dialectique picturale, l'artiste revendique de nouvelles pratiques pour une approche différente de l'univers. L'improvisation, la spontanéité et la vitesse sont requises au nom de l'imaginaire, de l'inconnu et du risque pour un bouleversement prémonitoire, celui de la fin de l'image.
Les œuvres de Mathieu, qui font l'objet de nombreuses rétrospectives depuis plus de quarante-ans, sont visibles dans plus de quatre-vingts collections publiques, y compris l'Art Institute of Chicago ; le Centre George Pompidou à Paris ; le Hirshhorn Museum and Sculpture Garden à Washington, DC ; le Salomon R. Guggenheim de New York, la Tate à Londres, le Musée d'Art Moderne de la ville de Paris etc. Selon le mot de Clément Greenberg, Mathieu était le plus influent des peintres européens.
La toile titrée Ornithogale appartient à une importante série de peintures que Mathieu réalise en 1978. Le nom est celui d'une plante à bulbe communément connue sous celui d'étoile de Bethléem. Formé à partir de deux mots grecs : ornithos : oiseau et gala : lait. Si ceux-ci peuvent être évoqués par la blancheur de l'écriture hiéroglyphique, allusion aux pétales de l'ombelle, Mathieu donne toujours un titre une fois la peinture terminée et rejette toute interprétation littéraire ou historique. Il ne faut chercher aucune correspondance identitaire et pas davantage une interprétation symbolique.
En affirmant que le signe précède le sens, c'est la plénitude du signe qui convoque l'Histoire et non l'inverse. C'est avec un geste essentiellement pictural qu'advient la créativité.
Avec Ornithogale la prégnance du signe est absolue. La fulgurance du trait égale celle du geste assuré, jusque dans son appropriation de l'espace. Volontairement décentré, le noyau graphique impose sa posture héraldique d'une souveraine grandeur classique en se détachant d'un fond brossé dans un ocre sombre. Telle une comète, un unique trait se prolonge dans une trajectoire détentrice du commencement et de l'aboutissement d'une nouvelle liberté. Toujours structuré l'informel précède la naissance dans un fracas paroxystique qui prend appui d'un petit rectangle rouge.
Cette phénoménologie de l'acte de peindre fait de Georges Mathieu un précurseur et un visionnaire dont la peinture flamboyante et cosmique est indissociable de l'action spirituelle vécue par les grands mystiques en renouant avec le vide originel.
Le signe appartient à l'ordre du cri et du rituel, à la jubilation où alternent le risque et la maîtrise, l'extase et la pensée dans une solitude existentielle absolue. A la fin d'un corpus mythique, Mathieu peut se dire « Désormais seul en face de Dieu ».

In 1985 at the Palais des Papes in Avignon, an important exhibition was held after the 1978 retrospective in Paris at the Grand Palais. A collection of one hundred very large paintings, representative of Mathieu's career since 1944, established the prominence of an artist who made a name for and gave lyrical abstraction its prestige. From revolt to renaissance, to prophetic abstraction, Mathieu's language has become a recognized signature style. With the publication of his text Esquisse pour une Embryologie des Signes in 1951, Mathieu elevated the sign to a founding act of semantic inversion, thus erasing an entire
system of thought from Plato to Heidegger. By creating a new pictorial dialectic, the artist advocates new practices to seek a fresh approach to the universe. The imaginary requires improvisation, spontaneity and speed; the risk of the unknown conducive to a premonitory upheaval: the end of the image. The past forty years have been marked by numerous retrospectives of Mathieu's work in over eighty public collections, including the Art Institute of Chicago; the Centre George Pompidou in Paris; the Hirshhorn Museum and Sculpture Garden in Washington, DC; the Salomon R. Guggenheim in New York; the Tate in London; the Musée d'Art Moderne de la Ville de Paris and many more. In the words of Clement Greenberg, Mathieu was the most influential among European painters. One of an important series created by Mathieu in 1978, the title of this painting, Ornithogale, refers to a bulbous plant commonly known as the Star of Bethlehem, formed from two Greek words ornithos: bird, and gala: milk. Though these might evoke the whiteness of his hieroglyphic writing, an allusion to the petals of the umbel, Mathieu only ever named a painting once it was finished and rejected any literary or historical interpretation. One should not expect a reference to something specific, or some symbolic interpretation.
By affirming that signs precede meaning, it is the plenitude of the sign that summons History and not the opposite. Indeed, it is during the pictorial gesture that creativity emerges. With Ornithogale, the relevance of the sign is absolute. The dynamism of the stroke is coupled with the resolve in his gesture as it appropriates the space. Voluntarily off-centre, the graphic nucleus imposes its heraldic posture with a regal, classical grandeur by emerging from a background brushed in dark ochre. Like a comet, a single line extends in a trajectory containing at once the inception and the achievement of a true emancipation. Always structured, the informal precedes deliverance in a paroxysmal crash while anchored to a small red rectangle. This phenomenology ofthe act of painting is why Georges Mathieu is both a precursor and a visionary. His flamboyant and cosmic art is inextricably linked to the spiritual activity experienced by great mystics when reconnecting with the original void. The sign, the cry and the ritual are of kindred spirit, the joy of risk and mastery, ecstasy and thought alternating in total existential solitude. At completion of a mythical corpus, Mathieu could say to himself:
'Henceforth alone before God'.
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